Bon voilà mon vieux a eu 59 ans hier...
Je n’ai pas pu lui souhaiter car il est quelque part dans son 4X4 jaune canari, entre deux dunes dans le désert de Lybie (ou de Libye, c’est comme vous voulez, de toute façons je ne retiendrais jamais la bonne orthographe, c’est un peu comme les prénoms Cécile et Céline, je suis incapable de...bon, bref, c’est pas le sujet).
Ben ouais, mon vieux voyage... pour le boulot, ou pour lui-même, on ne sait pas vraiment, probablement les deux. Ce qui est sûr c’est que mon vieux n’est pas de ceux que vous trouverez en charentaises, avec une verveine à écouter des émissions littéraires sur France Culture...
C’est drôle, parce qu’il est probablement la personne qui me fait le plus de remontrances ou de raisonnements sur mes choix de vies, comme mon choix professionnel par exemple, alors qu’il est le premier à faire des choix incongrus, pas par folie furieuse (quoique), mais par goût immodéré de liberté, et puis par égoïsme un peu aussi...
Mon vieux est atypique, mais terriblement conventionnel dans ce qu’il attend de moi par exemple.
Mon vieux est trés généreux et pourtant incroyablement égoïste.
Mon vieux est mysogine, mais complètement amoureux de la femme.
Mon vieux est menteur, mais pourtant incroyable authentique.
Mon vieux est un baroudeur, terriblement attaché à sa maison.
Mon vieux est insupportable, mais pourtant terriblement attachant.
Enfin je me souviens surtout du côté insupportable quand il m’appelle à 7h50 du matin avec son téléphone satellite depuis l’autre bout de la planète, pour me dire entre deux hachures qu’il faut que j’envoie impérativement sans faute un cd en chronopost, contenant tel et tel document, à tel magazine à Paris, pour faire la promo de tel truc, question de vie ou de mort. Evidemment je jaillit hirsute hors de mon lit et des bras de mon amoureux pour prendre des notes, en tenue d’eve bien-sûr, pas le temps d’enfiler quoique ce soit, et c’est le moment que choisi ma colloc pour se lever... La pauvre, c’est alors qu’elle est prise d’une vision apocalyptique de sa blonde collocataire à poil dans la pénombre, en train de hurler dans un téléphone, ne manquant pas de lui glisser un petit “désolée je suis à poil” au cas où elle aurait pas remarqué... SIC
De ses trois enfants, légitimes s’entend (les autres, merci de ne pas revendiquer votre existence), je suis probablement celle qui lui ressemble le plus, physiquement mais aussi mentalement.
Fatalement, je suis moi aussi paradoxale, et je porte donc sur mes frêles épaules toutes les attentes démesurées que ce personnage insaisissable conçoit pour sa descendance.
Fichtre! Vous parlez d’un poids, je dirais même un surpoids...
Ah! Ben voilà, un sujet qui fâche le vieux tout rouge : le surpoids de sa fifille adorée...
Trop dur... Surpoids causé, entre autre,par une accumulation de prise de cortisone plus jeune qui arrêta ma croissance et créea une robuste rétention d’eau. Bien installé par les années ce surpoids, n’évolue pas, ni en pire, ni en mieux par, soulignons le, un manque total de volonté de ma part, que quoique ce soit change.
Et c’est probablement ça le pire, “mais pourquoi ne veut-elle pas maigrir, pourquoi???”
Ben oui, c’est invivable pour lui, que je sois bien en chair et surtout, surtout que je le vive bien, ça le dépasse...
La raison est simple : sans ça je serais PAR-FAITE.
Mais la perfection c’est tellement ennuyeux, papa....
La dernière reflexion en date consiste à m’expliquer que si je rate les postes qui m’interessent, c’est parce que je suis “TROP GROSSE”.
Et oui, selon lui, à compétences égales, on a préfére une mince qui fait la gueule, qu’une “grosse” bien dans sa peau...
Heureusement, dit-il, j’ai de la chance, je suis une fille équilibrée (on se demande grâce à qui) avec une tête bien pleine, de la fantaisie, et j’ai dégôté , je cite, “un intellectuel qui se fout pas mal de mon physique”, et c’est tant mieux, mais bon quand même je serais tellement mieux si j’étais mince...
Je remercie ma colloc et ma mère qui ont répondu à ses propos, en lui signifiant avec ironie : “c’est évident que votre fille est moche comme un cul” ou encore “tout le monde n’a pas forcément l’intention de se taper ses collaboratrices”, ou encore “ il n’y pas que des gros au chômdu...”
Nous nous voilons la face selon lui, et ne voulons pas entendre son argument. Quel argument?
Peut-être mon cher père serais-tu flatté ou du moins consolé d’apprendre que, bien que je sois en dessous de la taille minimum (= trop mince) l’on m’a proposé aujourd’hui du mannequinat pour filles rondes et jolies?
Ou encore que mon entourage professionnel m’appelle “la maï polida” (la plus jolie en oc)?
Non?
Ben tant pis. C’est pas ton corps, ni ta vie ce sont les miens. Et tant que je vivrais tout ça trés bien, tu devras t’en réjouir. C’est ballot !
Bon annif vieux chnock...
Réjouie-toi que tes enfants ne soient pas complètement à ton image, imagine le bordel...